La loi
macro-économique exposée dans ces quelques pages est le résultat de travaux de
recherche concentrés sur les comptes nationaux et effectués à partir d'une
expression mathématique que l'on trouve dans la plupart des manuels d'économie.
On la doit au célèbre économiste anglais John Maynard Keynes. Fondée sur des
données de comptabilité nationale, elle s'écrit comme suit :
C + I =
X (1)
C + S = Y (2)
X = Y (3)
I = S (4)
Sachant
d'une part que X représente le produit national, Y le revenu
national et C la consommation, et convenant d'autre part que le produit
national et le revenu national sont identiques, il s'ensuit que
l'investissement I est égal à l'épargne S.
Poussée au-delà des
données statiques sur lesquelles elle repose, l'étude de cette expression
montre que cette égalité entre l'épargne et l'investissement n'est que
comptable et que si l'on introduit la notion de période, il n'y a plus
d'équivalence. Il apparaît aussi que l'épargne est un des plus puissants
facteurs monétaires de ralentissement de l'activité de production, tandis qu'au
contraire l'investissement (plus précisément, le crédit) est un des plus
puissants facteurs d'accélération. La dynamique du processus économique
s'explique en partie par la dualité existant entre ces deux agrégats qui sont
interdépendants.
Une
distinction, qui apparaît fondamentale à l'étude macroéconomique, doit être
opérée entre l'activité de production qui s'inscrit dans la sphère dite réelle
et l'activité purement monétaire et financière qui s'inscrit dans une sphère
beaucoup plus vaste dont dépend la première.
L'étude
met en évidence l'existence de grandeurs économiques d'origine monétaire (comme
l'épargne des ménages), sans comparaison avec les agrégats traditionnels, qui
agissent sur la sphère réelle comme autant de vecteurs véhiculant les flux
monétaires de sens opposés qui leur sont propres. Elles règlent ainsi mais de
manière aléatoire (en l'absence de direction) l'allure de marche de l'activité
nationale.
La loi
macro-économique venant en conclusion de cette étude, montre qu'en intervenant
sur les flux monétaires on peut conduire l'économie, c'est-à-dire l'orienter
vers l'expansion et la protéger de la récession. Elle montre en outre que si
l'on veut soustraire l'activité économique d'un pays aux aléas de la
conjoncture, son financement doit être organisé comme l'est celui de n'importe
quelle activité d'entreprise.
1 - Les
grandeurs économiques de la sphère réelle
Rappelons
brièvement que :
- les grandeurs économiques qui composent la sphère réelle,
c'est-à-dire l'activité de production, sont les suivantes :
Consommation (C)
Investissement (I)
variations de stock incluses,
Exportation (EX)
Importation
(IM)
ce qui
donne le Produit Intérieur Brut (PIB) que l'on nommera :
Produit National (PN),
- et que ces grandeurs répondent à l'égalité :
C + I + EX -
IM = PN (5)
Dans
cette étude, la composition de ces grandeurs économiques appelle deux
observations importantes:
. l'investissement (I) représentant l'outil de
production est exclusivement réservé aux entreprises, tandis que
l'investissement des ménages (logements neufs, par exemple) est repris à la
consommation (C). Cette répartition différente de celle retenue en
comptabilité nationale (qui privilégie la notion de capital/investissement) a
pour but d'opposer producteurs et consommateurs, la durée de vie des biens
produits étant secondaire. Elle n'altère en rien l'égalité ci-dessus.
. la consommation de l'Etat est une consommation
intermédiaire, comme celle de toute entreprise exerçant une fonction de
production. La consommation finale qui lui est attribuée par les comptables
nationaux (correspondant à la consommation collective des ménages), est donc
incluse dans la consommation (C).
Il
s'ensuit que la consommation (C) appartient aux ménages,
l'investissement (I) aux entreprises, et le solde des échanges
extérieurs (EX - IM) à l'étranger.
Le
produit national (PN) est la somme des échanges en monnaie nationale
composant l'activité de production du pays. Il constitue le revenu national (RN),
d'où l'égalité:
PN = RN (6)
Il est
en effet réparti par les entreprises, qui sont à l'origine de sa création,
intégralement et nécessairement entre les ménages et elles-mêmes. Il en résulte
deux grandeurs économiques, le revenu des ménages et le revenu des entreprises,
qui occupent par leur part relative une place prépondérante dans le processus macro-économique
où tout se tient. On peut donner comme définition du revenu des entreprises ce
que les analystes financiers appellent l'autofinancement (en anglais le
cash-flow), c'est-à-dire la somme des revenus nets non distribués, des
amortissements et des provisions à caractère de réserve. En règle générale, les
entreprises trouvent là les moyens financiers de reconstituer leur outil de
production, c'est l'objet de l'amortissement, et d'assurer leur essor grâce à
de nouveaux investissements, c'est pour partie l'objet des réserves (fonds
propres).
Ainsi,
la sphère réelle comprend-elle de nouvelles grandeurs économiques :
le Revenu des
ménages (RM)
le Revenu des entreprises (RE)
dont la
somme donne :
le Revenu
National (RN)
soit
l'égalité :
RM + RE = RN (7)
Sachant
que PN = RN, on peut résumer les principales égalités
de la sphère réelle comme suit :
C + I + EX -
IM = PN = RN = RM + RE (8)
2 - Les
grandeurs économiques de la sphère monétaire et financière (première fraction
utilisée à l'activité de production)
Ce
chapitre traite du financement de l'activité nationale de production par le
système bancaire ; celui-ci exerçant la double fonction de créateur et de
dépositaire de la monnaie.
Chaque
cellule économique, qu'il s'agisse d'un ménage, d'une entreprise ou de
l'étranger, finance sa part dans l'activité de production, en utilisant ses
ressources propres, partiellement ou totalement, et celles du crédit dont elle
peut se prévaloir. Ce crédit, elle peut l'obtenir soit auprès du secteur
bancaire (objet de ce chapitre), soit auprès d'une autre cellule par
financement inter-agent (chapitre suivant).
Ainsi
le financement de l'activité de production peut être décomposé par groupe
d'agents :
- la consommation des ménages est financée par leur revenu (RM)
augmenté du crédit à la consommation (KM) et diminué de leur épargne (SM),
soit:
C = RM + KM - SM (9)
ce qui
peut s'écrire également, en séparant les deux sphères d'activité,
RM - C = SM - KM (10)
étant
précisé que l'épargne des ménages est égale à la fraction non consommée de leur
revenu et que le crédit à la consommation comprend les crédits accordés
diminués des remboursements sur crédits antérieurs.
- l'investissement des entreprises est financé de la même
manière par leur revenu (RE) augmenté du crédit à la production (KE)
et diminué de leur épargne (SE), soit :
I = RE
+ KE - SE (11)
ce qui
peut s'écrire aussi :
RE - I = SE -
KE (12)
étant
précisé, comme pour les ménages, que l'épargne des entreprises est égale à la
fraction non investie de leur revenu et que le crédit à la production comprend
les crédits accordés diminués des remboursements sur crédits antérieurs.
- les échanges avec l'étranger sont financés par deux
courants monétaires de sens contraires qui en forment le solde, d'un côté les
crédits (KX) consentis à l'étranger (exportations) sous la forme de
crédits à terme (classique) ou à vue (contre devises) diminués de la remise de
monnaie nationale (SX) faite à l'exportateur par l'étranger, et de
l'autre, les crédits (KX) obtenus de l'étranger (importations) sous les
mêmes formes que décrites ci-dessus, diminués de l'apport de monnaie nationale
(SX) fait à l'étranger par l'importateur; le financement du solde dans
un sens ou dans l'autre répondant à l'égalité:
EX - IM
= KX - SX (13)
la
monnaie étrangère étant ainsi assimilée à un titre de créance spécifique,
donnant lieu à création ou destruction de monnaie nationale, selon le sens de
l'échange, dès lors qu'elle est changée contre monnaie nationale.
Comme
pour les deux autres agents, on a décrit le financement de ces échanges en nous
plaçant dans la position de l'étranger, puisque c'est lui qui représente la partie
opposée des échanges extérieurs d'un pays, mais l'absence de revenu le
concernant enlève une grande part de l'intérêt que l'on peut porter à ce
financement. Aussi, retiendra-t-on indifféremment l'expression mathématique du
solde de ces échanges (EX - IM) ou celle du solde de son financement (KX
- SX).
Si on
fait la somme de nos trois financements, en reprenant les équations ci-dessous:
C = RM + KM - SM (éq.9)
I
= RE + KE - SE (éq.11)
EX - IM
= KX - SX (éq.13)
on aura
le financement de l'activité nationale:
(C + I + EX -
IM) = (RM + RE) + (KM + KE + KX) - (SM + SE + SX) (14)
ou
bien, en séparant les deux sphères d'activité:
(RM + RE) - (C + I
+ EX - IM) = (SM + SE + SX) - (KM + KE + KX) (15)
En
écartant le financement inter-agent et les échanges portant sur le patrimoine,
objet des deux chapitres suivants, on a réduit l'activité de production à ses
relations financières avec le système bancaire.
3 - Les
grandeurs économiques de la sphère monétaire et financière (deuxième fraction
utilisée à l'activité de production)
Après
avoir examiné la part des banques dans le financement de l'activité nationale
de production, il nous reste à voir la part qu'y occupe le financement
inter-agent.
Si
celui-ci permet de réduire la création monétaire générée par le système
bancaire, ce financement est incapable de fournir les besoins monétaires
nécessaires à la croissance, puisqu'il est par définition égal à zéro. Il est
fait de transactions monétaires qui ne donnent pas lieu à création de monnaie
puisque le secteur bancaire en est écarté, mais qui servent à la création de
richesses. Il s'agit par exemple des crédits consentis par l'entreprise à son
client (ménage ou étranger), des avances faites par le client à son
fournisseur, des prêts et emprunts destinés à la fonction de production, de la
souscription de l'un ou l'autre des agents à l'émission d'actions ou
d'obligations faite par l'un d'entre eux, etc. Elles impliquent un simple
transfert de monnaie, déjà émise, d'un agent à l'autre.
Sachant
que les deux termes d'une même transaction sont de signes contraires, si l'on
désigne par FM, FE et FX, le financement par les ménages,
les entreprises et l'étranger aux uns et aux autres, on peut écrire l'égalité
comptable suivante:
FM + FE + FX
= 0 (16)
Si l'on
ajoute à présent le financement inter-agent au financement bancaire, on aura
l'ensemble du financement de l'activité nationale de production tout entière,
soit l'égalité suivante qui résulte des deux précédentes (15 et 16):
(RM + RE) - (C + I
+ EX - IM) = (SM + SE + SX) - (KM + KE + KX) + (FM + FE + FX)
(17)
On
distingue mieux maintenant l'étendue de la dépendance de la sphère réelle à
l'égard de la sphère monétaire et financière.
4 - Les
grandeurs économiques de la sphère monétaire et financière (fraction utilisée
hors du champ de l'activité de production)
Pour
être complet dans l'examen des éléments constituant la sphère monétaire et
financière, il convient d'aborder la dernière série de transactions financières
qui ne donnent lieu à aucune création de richesses. La principale
caractéristique de ces transactions est qu'elles portent sur des biens
existants, tels que valeurs immobilisées, valeurs de placement ou encore
valeurs en devises, que l'on appellera valeurs de patrimoine. Précisons
que les honoraires, frais et taxes qui sont attachés à ces transactions font
partie de la sphère réelle.
Comme
dans le financement inter-agent, ces transactions impliquent un échange de
monnaie. Cependant, ainsi qu'on va pouvoir le vérifier, elles peuvent être à
l'origine de création monétaire dans la mesure où elles font appel au crédit
auprès de banques créatrices.
Sachant
que les deux termes d'une même transaction (dans laquelle on a le cédant et le
cessionnaire) sont de signes opposés, si l'on désigne par PM, PE et
PX, les valeurs de patrimoine échangées entre les trois agents économiques,
on peut écrire l'égalité comptable suivante:
PM + PE + PX = 0 (18)
montrant
qu'il n'y a pas création de richesses.
Les
plus ou moins values dégagées par le cédant font l'objet d'un traitement
comptable distinct de la transaction.
S'il
n'est pas assuré par le financement inter-agent mais bien par le système
bancaire, ce qui est le cas pour de nombreuses opérations de bourse et de
change, le financement de ces transactions, ne concernant évidemment que le
cessionnaire, répond à l'égalité suivante:
(PM + PE + PX) = (KM1 + KE1 + KX1) - (SM1 + SE1 + SX1) = 0 (19)
Les
liquidités et l'épargne se confondant, les liquidités monétaires (S) étant
passées d'un agent à l'autre, la somme des crédits (K1) accordés pour ce
type de transactions (déduction faite des remboursements sur crédits antérieurs
de même catégorie), correspond à un accroissement de la masse monétaire (S1)
si elle est positive, et à une réduction de la même masse si elle est négative.
La
création monétaire s'exerce donc en l'absence de création de richesses, ce qui
signifie que l'activité de production n'est pas la source exclusive de la
création monétaire.
5 - La
rotation des échanges
La
sphère réelle ne "tourne" pas sans obéir à un cycle d'ordre
monétaire. Généralement chaque mois, en effet, des centaines de millions de
salariés, dans le monde entier, perçoivent leur salaire, et chaque mois suivant
ils épargnent, ils empruntent et ils consomment. Les mouvements bancaires, à
cet égard, témoignent de ce rythme perpétuel de l'économie : les comptes
bancaires des ménages sont régulièrement approvisionnés en fin de mois, et tout
aussi régulièrement "vidés" tout au long du mois suivant, alors que
simultanément les comptes des entreprises enregistrent les mêmes opérations en
sens inverse.
Ainsi,
peut-on dire que l'activité économique nationale tout entière bat au rythme des
échanges entre producteurs et consommateurs, sur la base d'une révolution
mensuelle.
On
parlera de périodes, puisque les variations que subissent les grandeurs
économiques dans le mouvement qu'impriment les échanges à la sphère réelle ne
peuvent être analysées et mesurées autrement qu'en séparant, par séquence,
leurs révolutions. Pour simplifier, on écartera le financement inter-agent et
les transactions portant sur le patrimoine qui sont sans effet sur l'ensemble
puisqu'ils sont tous deux égaux à zéro, ainsi qu'on l'a vu. On partira d'un
fait essentiel dans la reconnaissance du processus économique, c'est que le
revenu des ménages (RM) d'une période est utilisé, c'est-à-dire partagé
entre consommation (C) et épargne (SM), lors de la période
suivante.
Pour
intégrer cette notion de périodicité dans nos égalités, faisons suivre les
symboles retenus, de l'indice t et d'un nombre pour désigner la période.
Ainsi, le revenu des ménages de la période de base sera exprimé par RMto,
et celui de la période suivante par RMt1, et ainsi de suite.
Dans
ces conditions, le financement de la consommation des ménages d'une période t1
peut s'écrire, cette fois-ci en mode dynamique, en reprenant la relation (9) et
en tenant compte du temps ou plutôt de la période:
Ct1 = RMt0 - SMt1 + KMt1 (20)
En
clair, cela signifie que le revenu des ménages d'une période que l'on supposera
appartenant au mois t0, diminué de leur épargne constituée le mois
suivant t1, et augmenté du crédit net à la consommation qu'ils ont pu
obtenir au cours de ce même mois t1, leur a permis de procéder à leurs
achats de consommation du mois t1. Ce sont donc ces trois grandeurs
économiques, le revenu des ménages et le crédit à la consommation dans un sens,
l'épargne ou revenu non consommé dans l'autre, qui vont déterminer le niveau de
la consommation de la période t1.
De
même, le financement de l'investissement des entreprises d'une période t1
peut s'écrire comme suit, de nouveau en mode dynamique, en reprenant la
relation (11) et en tenant compte de la période :
It1 =
REt0 - SEt1 + KEt1 (21)
Concernant
l'étranger, ainsi qu'on l'a vu, l'absence de revenu et l'égalité existant entre
la balance commerciale des échanges extérieurs et son financement nous
permettent de donner à l'une et à l'autre la même période, soit:
EXt1 - IMt1
= SXt1 + KXt1 (22)
Si l'on
fait à présent la somme de nos trois financements, comme on l'a fait en mode
statique au-dessus (cf. éq.14),
Ct1 =
RMt0 - SMt1 + KMt1 (éq.20)
It1 =
REt0 - SEt1 + KEt1 (éq.21)
EXt1 - IMt1 =
SXt1 + KXt1 (éq.22)
on aura
le financement de l'activité nationale, cette fois-ci en mode dynamique (23):
(Ct1 + It1 + EXt1 -
IMt1) = (RMt0 + REt0) + (KMt1 + KEt1 + KXt1) - (SMt1 + SEt1 + SXt1)
La
description que l'on vient de donner du processus repose sur une rotation
mensuelle des échanges. Mais, ce qui est vrai pour une rotation mensuelle,
l'est aussi pour des rotations trimestrielles, semestrielles ou annuelles à la
condition que les périodes considérées soient successives et de même durée
puisqu'il s'agit dans tous les cas de passer d'une activité économique à une
autre.
6 - Le
rôle de la monnaie dans l'évolution du produit national et de la croissance
Ce
chapitre explique comment l'activité nationale de production évolue et passe
d'une période à l'autre par une simple variation des grandeurs monétaires qui
la sous-tendent. Il décrit également comment les facteurs monétaires agissent
sur la croissance à condition de les corriger de l'inflation, ou pour reprendre
une expression technique en usage chez les professionnels, de "déflater"
non seulement le produit national et ses composantes comme le font les
comptables nationaux, mais aussi les grandeurs monétaires qui l'animent.
Sur la
base de la relation (8) reproduite ci-après:
C + I + EX -
IM = PN = RN = RM + RE (éq.8)
et de
la relation (23) ci-dessus, on peut écrire l'expression suivante:
PNt1 = (RMt0 + REt0) + (KMt1 + KEt1 + KXt1) - (SMt1 +
SEt1 + SXt1) (24)
ou:
PNt1 = PNt0 + (KMt1 + KEt1 + KXt1) - (SMt1 + SEt1 +
SXt1) (25)
qui
montre bien que le Produit national d'une période est égal à celui de la
période précédente augmenté des crédits (Kt1) accordés par le système
bancaire à nos trois agents économiques et diminué de leur épargne (St1)
au cours de la période. Ainsi qu'on l'a dit, le financement inter-agent égal
par définition à zéro, ne peut avoir d'autre incidence sur l'activité nationale
que celle de réduire la part de (K) et d'autant celle de (S),
c'est-à-dire l'émission monétaire, et ne peut par conséquent avoir d'effet à la
hausse ou à la baisse sur cette activité.
S'appuyant
sur l'égalité (25) qui précède, on peut écrire que:
PNt1 - PNt0 = (KEt1 - SEt1 + KXt1 - SXt1) - (SMt1 -
KMt1) (26)
il
s'ensuit donc que, si :
(KEt1 - SEt1 + KXt1 - SXt1) > (SMt1 - KMt1)
(27)
on aura
nécessairement :
PNt1 > PNt0 (28)
c'est-à-dire une activité en
hausse, en valeur nominale,
et inversement, si :
(KEt1 - SEt1 + KXt1 - SXt1) < (SMt1 - KMt1)
(29)
on aura
nécessairement :
PNt1 < PNt0 (30)
c'est-à-dire une activité en
baisse, en valeur nominale.
Si l'on
définit, d'une part l'épargne nette des ménages comme étant leur épargne
diminuée du crédit à la consommation, soit (SMt1 - KMt1), d'autre part
l'endettement net des entreprises comme étant le crédit à la production
diminué de leur épargne, soit (KEt1 - SEt1), et sachant par ailleurs que
la balance des échanges extérieurs (EX - IM) est égale à son
financement (KXt1 - SXt1),
on peut
dire que l'activité de production est en hausse ou en baisse en valeur
nominale, selon que la somme algébrique de l'endettement net des entreprises et
de la balance des échanges extérieurs est supérieure ou inférieure à l'épargne
nette des ménages.
Ce qui
démontre que l'épargne nette des ménages exerce un effet de frein sur le
processus économique et entraîne l'activité de production à la baisse si elle
n'est pas couverte par l'endettement net des entreprises, tandis que celui-ci
exerce un effet d'accélérateur et conduit l'activité à la hausse s'il est
supérieur à l'épargne nette des ménages, la balance des échanges extérieurs
produisant un effet d'accélérateur ou de frein selon qu'elle est positive ou
négative.
Le
niveau de l'activité nationale dépend donc de son financement. Il est déterminé
par les relations existant entre les grandeurs monétaires qui naissent du
financement des échanges que pratiquent entre eux les trois agents économiques
au sein de la sphère réelle. En conséquence, il ne peut y avoir de stabilité
dans l'activité nationale de production s'il n'y a pas un plan de financement
et la mise en place d'un centre de régulation monétaire et financière. La
conjoncture n'est rien d'autre que l'aspect incertain d'une économie livrée à
elle-même.
Avant
d'aborder l'action des facteurs monétaires sur la croissance, il paraît utile
de donner un exemple chiffré qui mette en évidence les égalités qui viennent
d'être énoncées et leurs conclusions.
Partant
d'une production donnée pour la période t0, le modèle montre
l'enchaînement avec les deux périodes suivantes t1 et t2. Il
montre également comment les grandeurs monétaires conduisent l'activité de
production successivement à la baisse en t1 et à la hausse en t2.
Rubriques |
Ménages |
Entreprises |
Etranger |
Ensemble |
Période
t0
Production
|
|
PNt0
|
1000
|
Période
t1
Revenu
Financement
inter-agent
Epargne
Crédit
Production
|
RMt0
FMt1
SMt1
KMt1
Ct1
|
900
- 12
106
49
831
|
REt0
FEt1
SEt1
KEt1
It1
|
100
+ 17
5
33
145
|
FXt1
SXt1
KXt1
EXIMt1
|
0
- 5
12
35
+ 18
|
RNt0
Ft1
St1
Kt1
PNt1
|
1000
0
123
117
994
|
La
répartition du produit national, sous forme de revenu, entre les entreprises et
les ménages est aléatoire. Elle résulte des conflits d’intérêts entre les
agents économiques. Mais, le niveau de la production en monnaie courante
découle directement de l’application stricte de la loi macroéconomique.
Rubriques |
Ménages |
Entreprises |
Etranger |
Ensemble |
Période
t2
Revenu
Financement
inter-agent
Epargne
Crédit
Production
|
RMt1
FMt2
SMt2
KMt2
Ct2
|
896
- 22
90
66
850
|
REt1
FEt2
SEt2
KEt2
It2
|
98
+ 30
8
19
139
|
FXt2
SXt2
KXt2
EXIMt2
|
0
- 8
5
26
+ 13
|
RNt1
Ft2
St2
Kt2
PNt2
|
994
0
103
111
1002
|
Le lecteur trouvera par ailleurs la simulation d’une
activité nationale simplifiée et son financement reprenant et
développant le modèle examiné ci-dessus.
Voyons
à présent comment se définit la croissance dans le processus économique que
l'on vient d'examiner. Lorsque les instituts de statistiques après avoir mesuré
le produit national et fixé les taux de croissance et d'inflation, les
intègrent ensuite une fois l'an dans la comptabilité nationale, ils valident
par le fait même la démarche comptable d'ensemble qui relie les comptes de
résultats aux comptes de bilan, c'est-à-dire le produit national à son
financement. La multitude des comptes rend peut-être difficile la synthèse des
opérations élémentaires et des grandeurs économiques qui les regroupent comme
elle est faite ici, mais, les relations mathématiques qui les définissent ne
font que traduire des relations comptables existantes. Le produit national
étant lié par les comptes à son financement, ses variations (faites de la
croissance et de l'inflation) se retrouvent nécessairement dans son
financement, c'est-à-dire en définitive dans les grandeurs monétaires qui le
composent.
Pour
connaître la croissance ou la différence d'activité d'une période à l'autre,
les instituts calculent la production d'une période aux prix de la précédente
ou à ceux d'une période de référence et éliminent ainsi l'érosion monétaire,
c'est-à-dire les variations de prix qui ont affecté les échanges. Dans leurs
publications, les instituts donnent donc deux mesures du PIB, la première en
monnaie courante, la seconde aux prix de la période de référence. La croissance
est égale à la différence existant entre les PIB de deux périodes consécutives
d'activité calculés aux mêmes prix ou aux prix de référence. Si l'on procède de
même, on aura le Produit national PNt1 qui désignera pour une période t1
l'activité en monnaie courante, ou en valeur nominale (terme employé plus haut)
et PN't1 qui désignera pour la même période l'activité en volume dans
laquelle l'inflation aura été éliminée. La croissance (C) sera égale à:
C = PN't1 - PNt0 (31)
si
l'activité de t1 est calculée aux prix de t0, égalité que l'on
retiendra dans les développements qui suivent, ou
C = PN't1 - PN't0 (32)
si les
activités de deux périodes successives sont calculées aux prix d'une même
période de référence.
Sur la
base des équations (31) et (25), cette dernière reproduite ci-dessous:
PNt1 = PNt0 + (KMt1 + KEt1 + KXt1) - (SMt1 + SEt1 +
SXt1) (éq.25)
et en
appliquant à (KMt1 + KEt1 + KXt1) - (SMt1 + SEt1 + SXt1) le rapport
existant entre PN't1 et PNt1, ce qui revient à
"déflater" les grandeurs monétaires de la relation (25), on peut
écrire que:
PN't1 = PNt0 + (KM't1 + KE't1 + KX't1) - (SM't1 +
SE't1 + SX't1) (33)
il s'ensuit donc que si :
(KE't1 - SE't1 + KX't1 - SX't1) > (SM't1 -
KM't1) (34)
on aura
nécessairement:
PN't1 > PNt0 (35)
c'est-à-dire
une activité en expansion ou en croissance positive,
et inversement, si :
(KE't1 - SE't1 + KX't1 - SX't1) < (SM't1 - KM't1)
(36)
on aura
nécessairement :
PN't1 < PNt0 (37)
c'est-à-dire
une activité en récession, ou en croissance négative.
En
d'autres termes, l'activité de production est en phase d'expansion ou de
récession, selon que le rapport :
(KE't1 - SE't1 + KX't1 - SX't1) / (SM't1 - KM't1)
(38)
est supérieur ou inférieur à 1.
En
clair, cela signifie qu'en monnaie constante ou "déflatée" l'activité
nationale de production est en phase d'expansion ou de récession, selon que la
somme algébrique de l'endettement net des entreprises et du solde du
financement des échanges extérieurs est supérieure ou inférieure à l'épargne
nette des ménages. Précisons ici que la balance des échanges extérieurs (EX't1
- IM't1) comprise dans PN't1, n'est plus égale à son financement (KX't1
- SX't1), puisqu'ils sont calculés sur des bases différentes.
L'activité
nationale de production est en expansion ou en récession, selon que la quantité
de monnaie "déflatée" injectée dans la sphère réelle est plus ou
moins grande d'une période à l'autre.
Nous
pouvons ajouter, toujours à monnaie constante ou "déflatée", que :
- en phase d'expansion, le gain de pouvoir d'achat qui revient à
la population tout entière (ménages et entreprises confondus) est égal à la
croissance positive, soit:
(KE't1 - SE't1 + KX't1 - SX't1) - (SM't1 - KM't1), si >
0 (39)
tandis
qu'inversement,
- en phase de récession, la perte de pouvoir d'achat qui affecte
la population tout entière (ménages et entreprises confondus) est égale à la
croissance négative, soit:
(KE't1 - SE't1 + KX't1 - SX't1) - (SM't1 - KM't1), si <
0 (40)
Ainsi,
la croissance mesurée en unité monétaire "déflatée", crée ou détruit
du pouvoir d'achat national, selon qu'elle est positive ou négative. On
observera que le financement des échanges extérieurs affecte le pouvoir d'achat
des agents nationaux, à la hausse ou à la baisse, selon que KX't1 - SX't1
est supérieur ou inférieur à 0.
Croissance
et inflation des prix sont étroitement liées puisqu'elles s'inscrivent toutes
deux dans les flux monétaires qui dirigent et orientent l'activité nationale de
production. D'ailleurs, l'observation des événements passés montre qu'on a en
règle générale,
PNt1 > PN't1 > PNt0 (41)
ce qui
signifie, dans ces conditions, qu'il n'y a pas de croissance sans inflation.
7 -
Conclusions
Partant
d'une expression mathématique d'origine keynésienne, il aurait été surprenant
que l'analyse s'oppose à celle de Keynes. Chez lui, l'épargne n'est rien
d'autre qu'une non-consommation, ce qui implique une fuite dans le circuit
économique. Certains auteurs en ont tiré la conclusion que l'économie est en
équilibre si l'investissement est d'un montant égal à l'épargne, ce qui conduit
à l'hypothèse selon laquelle la production nationale tend vers l'expansion si
l'investissement I est plus grand que l'épargne S, tandis qu'elle
tend vers la récession dans le cas contraire. La loi macro-économique que l'on
vient de définir ne fait donc que confirmer sur ce point les travaux du célèbre
économiste anglais par une analyse plus fine puisqu'elle prend en compte tous
les facteurs monétaires qui agissent sur l'allure de marche de l'activité de
production.
Cette
loi universelle démontre que l'activité de production d'un pays dépend de son
financement.
L'économie
nationale étant faite de la somme de toutes les activités de production, et
chaque activité étant elle-même financée, la somme des financements de toutes
les activités représente le financement de l'économie nationale.
8 -
Appendice
Un
retraitement approprié des comptes nationaux a permis de restituer toutes les
grandeurs économiques contenues dans la loi macro-économique et d'en vérifier
les égalités. Il a mis aussi en évidence l'apport du secteur bancaire à la
création monétaire. S'appuyant sur un schéma de consolidation des comptes, il
peut servir de modèle crédible dans l'élaboration des prévisions économiques
d'un pays.
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