Sur la base de méthodes
normalisées dans la plupart des pays du monde, la mesure de l'économie est
assurée en France par l'Institut National de la Statistique et des
Etudes Economiques (Insee). Comme le nom de l'Institut l'indique, la mesure de
la richesse nationale connue sous le nom de Produit Intérieur Brut (PIB), somme
de toutes les activités de production du pays, est faite par une approche
statistique.
Pour déterminer le PIB,
l'Institut procède à partir d'enquêtes statistiques périodiques et d'un certain
nombre de déclarations fiscales et administratives, pour la plupart annuelles,
rendues obligatoires pour les entreprises et les administrations. A partir des
premières enquêtes, des informations relatives à la croissance du PIB sont
publiées chaque trimestre, mais la mesure véritable concerne l'année civile
entière.
Il y a quelques années, elle
faisait l'objet de quatre approches successives et donnait lieu à autant de
publications étalées sur 4 ans. En tenant compte des délais d'élaboration
effectifs des comptes de la
Nation, le PIB ne devenait donc définitif qu'au terme de
trois années entières de travaux ardus, ce qui peut paraître excessif, mais qui
s'explique par la prédominance des méthodes statistiques sur les méthodes
comptables, ainsi qu'on le verra plus loin. Depuis la publication des comptes
de l'année 1997, ces travaux ont été réduits à deux phases au lieu de quatre.
La mesure est faite en valeur
et en volume. La mesure en valeur (de transaction) permet de situer l'activité
nationale dans son environnement monétaire courant, tandis que la mesure en
volume permet de dégager la croissance réelle (positive ou négative) qu'elle a
connue, cette mesure en volume étant donnée en monnaie constante. D'une période
à l'autre, on peut obtenir à l'aide de ces deux termes ce que l'on a coutume
d'appeler l'inflation, qui n'est autre que l'érosion monétaire par les prix.
Comme il n'est déjà pas facile
en usant de procédures statistiques de connaître la somme des échanges à leur
valeur de transaction, c'est-à-dire en monnaie courante, les vraies difficultés
surgissent lorsqu'il s'agit de fixer les volumes. Si les productions agricole
et industrielle sont dans l'ensemble assez bien cernées, tant en valeur qu'en volume,
il n'en va pas de même de la production du commerce de détail et des services
pour des raisons évidentes de nombre.
Comme il existe des millions
d'articles et de services différents, il est quasiment impossible de procéder
dans le détail à une mesure directe du PIB en volume. On recherche alors le
taux d'inflation par échantillons-types ainsi qu'il a été dit de façon à
obtenir à défaut de volume par catégorie de produits, la somme des échanges à
prix constants. L'arrivée de nouveaux produits sur le marché et les changements
de qualité affectant les biens et services existants sont de véritables
casse-tête pour les statisticiens.
Etant donné la place que
tiennent les marchés, l'offre et la demande dans la théorie économique, il
semble très important d'appréhender les valeurs des transactions au prix du
marché sans perdre de vue les lois de l'offre et de la demande. Mais comme on
est en présence d'un ensemble de produits pour le moins très disparates, on
utilise trois axes d'approche qui doivent aboutir en principe au même résultat
: l'offre ou la production des entreprises, la demande (consommation,
investissement et commerce extérieur) et les revenus (des ménages et des
entreprises). Mais comme les travaux sont conduits à partir de données puisées
à des sources différentes et nécessairement incomplètes, il y a toujours des
écarts qui font l'objet d'arbitrages suivis d'ajustements.
Notons au passage, qu'en
procédant ainsi on fait l'impasse sur les écarts de sens inverse, bien connus
des comptables, qui existent fatalement et qui évidemment se compensent. Un
exemple particulièrement significatif de ce type d'erreur est analysé plus bas
dans ce chapitre.
Les arbitrages essentiels,
issus de la synthèse, interviennent dans la dernière phase du traitement,
c'est-à-dire lorsque le PIB devient définitif. Il convient de préciser qu'il ne
subit pas de variations importantes entre la première et la dernière phase,
raison pour laquelle vraisemblablement on a réduit le nombre de phases de
quatre à deux.
Parallèlement à ces travaux
d'élaboration du PIB, les comptables nationaux sont chargés de déterminer les
flux financiers obtenus à l'aide des comptes financiers des agents économiques,
et de préparer ainsi le cadre dans lequel il est prévu de "caser" les
données statistiques relatives au PIB.
Comme il en est de l'activité
nationale, les comptes financiers font eux aussi l'objet d'autant d'approches
successives. Par contre, ils subissent d'une phase d'ajustement à l'autre des
variations souvent très sensibles, les signes positifs pouvant devenir négatifs
et inversement, ce qui est pour le moins surprenant. Ils reçoivent en
définitive lors de chaque période d'ajustement les écarts appelés opportunément
"décalages comptables" existant entre l'activité de production (PIB)
et l'activité financière.
Voici donc comment sont
élaborés les comptes de la
Nation.
Comme on l'a déjà dit, les
méthodes retenues (ainsi que les erreurs qui en découlent !) sont normalisées
dans la plupart des pays. Cependant, la construction européenne a mis en
évidence des distorsions dans les modalités de calcul du taux d'inflation entre
les différents membres de la communauté, ce qui a donné lieu en son temps à des
travaux d'harmonisation. De plus, les problèmes de concordance entre les comptes
non financiers (activité de production) et les comptes financiers sont à
l'ordre du jour des instances nationales dans le cadre de l'harmonisation des
outils de mesure de la CEE,
ce qui prouve bien qu'il y a là un sérieux problème. Il ne faut donc pas
s'étonner que l'on relève les erreurs les plus grossières dans un tel ensemble
de comptes et de données statistiques dont l'incompatibilité de la concordance
saute aux yeux.
Ainsi, en donnant à l'Etat une
place indépendante et en faisant apparaître dans ses comptes une consommation
finale, réservée par essence aux ménages, les instituts de statistiques
commettent une erreur de belle taille.
On peut prendre pour exemple
les impôts liés à la production (TVA, droits de douane, et autres). Ceux-ci
sont décomptés deux fois dans le PIB : une première fois dans la
production marchande aux prix du marché (TTC), et une seconde fois dans la
production non marchande consommée (consommation finale de l'Etat). Il faut
savoir que la production non marchande consommée est égale aux coûts de
production supportés par les branches non marchandes, soit en fait la presque
totalité des charges de l'Etat. Mais, comme les charges de l'Etat sont
financées par l'impôt, les impôts liés à la production sont donc bien décomptés
deux fois.
En d’autres termes, on
peut dire que toute hausse du taux de la
TVA se traduit par une augmentation purement
artificielle des productions marchande et non marchande, c’est-à-dire du PIB.
Tandis qu'inversement, toute baisse de ce taux a pour effet une diminution tout
aussi artificielle du PIB. Dans le premier cas l'erreur est aggravée, alors que
dans le second elle est réduite.
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